Pour continuer à ouvrir notre vision de la sexualité, je suis allée au Café de Paris découvrir la SCEP : Société Communautaire des Effeuilleurs Parisiens, qui développe une vision disruptive et rafraîchissante des masculinités grâce au boylesque, du burlesque performé par des boys. Fondée au printemps 2018, suite au mouvement #metoo, la SCEP est la création de 6 artistes engagés : Azuka Eilhart, Vicomte Harbourg, Sans Titre, Tragic Mike, Sven Otine et Pamela en Personne.
Un nouveau genre de spectacle pour les personnes qui aiment tous les genres
La question centrale des spectacles de la SCEP est aussi simple que cruciale : “Que veut dire être un homme aujourd’hui ?”
S’ensuit une série de vignettes dénonçant subtilement les clichés, pratiques ou injonctions masculines : de la dickpick à la charge mentale, en passant par l’interdiction d’explorer le plaisir anal. Les saynètes sont exécutées en solo, en duo, ou carrément en groupe pour les numéros rassemblant tout le collectif.
Je garde un souvenir mémorable de la reprise par Vicomte Harbourg de la chanson du générique des “Mondes Engloutis” :
Sors de l’ennui des plaisirs existants
Un homme ne jouit pas que par devant
Va, explorer le trou noir sous le vent
Vis ton doux rêve pénétrant
Ô toi, hétéro cis, entre sans effroi
Et toi aussi, tu découvriras
Sors la prostate du tabou de l’oubli des glandes englouties !
Refrain :
Suis les glandes englouties… au tréfond du sphincter
Homme jouis et viens avec nous dans un monde plus divers
Le ton est drôle et ironique, parfois plus émouvant et souvent très sensuel. Les costumes, comme les idées reçues, volent en éclats et les corps se dévoilent sous les yeux d’un public jeune, chaleureux, très gai (un peu gay aussi, mais pas que). Les habitués côtoient les nouveaux-venus, qui étaient très nombreux ce soir-là. L’ambiance est électrique, avec un public laissé libre de rire ou tout aussi bien d’être excité par les danses sensuelles.
Vicomte Harbourg à la manœuvre
Ne vous laissez pas surprendre par la douceur de sa voix, le Vicomte Harbourg assure son rôle de MC à la perfection. J’ai franchement ri aux punchlines et jeux de mots mémorables : friends with benefist, l’orifice du tourisme, le calendrier de l’arrière !
J’étais captivée par toutes les prises de parole pour introduire les numéros : les mots sont justes, drôles, mais sans jamais dénaturer le propos qui est engagé sans être moralisateur.
Un quizz permet de faire participer le public tout en faisant le point sur les dates clés. C’est un rappel que les libertés dont nous jouissons aujourd’hui datent littéralement d’hier ! En quelle année le devoir conjugal (de la femme envers son mari) a-t-il été supprimé du code civil ? En quelle année l’homosexualité a-t-elle disparu des listes de maladies mentales ? Spoiler : c’est toujours beaucoup plus tard qu’on ne l’imagine…
La SCEP, un joli projet artistique et pédagogique à découvrir
L’idée de ce collectif majoritairement masculin n’est pas d’invisibiliser les femmes, mais d’introduire les hommes dans un genre nouveau : l’effeuillage comme arme de pédagogie massive. Comme souvent dans les spectacles de burlesque et de cabaret, l’humour est omniprésent pour mieux nous interpeller sur les questions qui gênent. Alors, qu’est-ce que veut dire être un homme aujourd’hui ?
Les artistes que j’ai vus ce soir-là : Eden Weiss, Matamore Occhio, Thomas Occhio, Saint Sébastian, Lolita Laze et Vicomte Harbourg, nous ont proposé une vision différente et si rafraîchissante de l’homme. Dans une époque où il est parfois compliqué de se connecter à son désir, j’en demande encore !
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