Retour sur ce phénomène qui fait autant flipper votre entourage que la peste ou le Covid : le célibat à 30 ans. Attention, alerte coup de gueule, je suis colère. Alors, au lieu de me venger sur le premier passant qui me jetterait un regard de travers -vivant à Marseille, c’est monnaie courante- ou sur mon paquet de Schoko-bons qui n’attend qu’une chose, que je l’éventre devant une énième retransmission des Desperate Housewives, je vais me confier à vous. Force est de constater qu’être une femme célibataire assumée à la trentaine est un sujet inépuisable. Un marronnier pour tout magazine féminin qui se respecte ou discussion en terrasse. Non, là Je vais vous parler du célibat vu comme une terrible tare, un virus même, dont visiblement on n’arrive pas à se dépêtrer et qui affole l’entourage, pour peu qu’il soit contagieux !
Marié.e, Séparé.e, Célibataire, cochez la bonne case
Être célibataire c’est soit un choix, soit une conséquence de la vie. Mais, en aucun cas un statut social. Pourtant, vivre sans partenaire est un statut juridique, oui oui, rappelez-vous de cette case à cocher quand vous remplissez votre fiche d’impôts ou votre carte fidélité Auchan.
Si je comprends la nécessité de savoir si on vit seul.e dans son foyer pour des besoins fiscaux, je pense qu’il faudrait changer “Célibataire” par un terme qui diffère de sa définition première. On a bien réussi à faire supprimer la case “Mademoiselle”. Car, au-delà de ces points de vue administratifs, être une femme célibataire à 30 ans, c’est aussi se voir refuser des prêts bancaires et faire la croix sur des projets perso, parce que c’est encore difficile d’avancer dans la société quand on est une femme seule.
Un mec célib’ à 30 ans c’est au mieux, un aventurier, un carriériste, au pire un Don Juan. Mais jamais un type désespéré. En revanche s’il a 30 ans et qu’il habite encore chez ses parents, c’est un Tanguy. Cela montre encore qu’aux yeux du monde (ou du cinéma français), être un homme bien vu dans la société se manifeste par la capacité à être indépendant financièrement et à quitter sa famille, tandis que pour une femme, la normalité veut que l’on soit casée et que l’on fonde une famille. On en parle du grand écart de position sociale ?
Etre une femme célibataire : ou l’art de devoir se justifier ou s’excuser
Ce n’est pas un mythe, quand tu dis à quelqu’un que t’es célibataire à 30 ans, tu es toujours obligée de te justifier ou d’expliquer les raisons pour lesquelles tu fais l’affront à la totalité de l’humanité de ne pas être maquée.
Pour ma part, je n’ai pas “fait exprès” d’être célibataire. Je veux dire, c‘est comme un coup de foudre ou la Covid-19, ça vous tombe dessus, parce que vous l’avez peut-être provoqué mais pas forcément prévu ou souhaité. Je suis tombée sur des hommes géniaux, on s’est séparés, et puis je suis tombée sur des mecs beaucoup moins géniaux qui m’ont appris que je préférais être seule que mal accompagnée. Et aujourd’hui c’est un choix.
Je viens fraîchement de déménager dans le Sud, et il n’y a pas une personne qui ne m’ait pas demandé si ce déménagement était lié à une rencontre, ou si je suivais un potentiel conjoint. Ces personnes éludent ainsi toute éventualité qu’une jeune femme de la trentaine puisse tout quitter et partir à l’autre bout de la France, sans que cela ne soit lié à sa vie sentimentale.
La femme célibataire, stéréotype de la loseuse
Etre une femme célibataire aujourd’hui, j’ai l’impression que c’est plus un problème pour les autres que pour soi. C’est un peu comme perdre son job, c’est considéré comme un énorme fail aux yeux de la société. L’intolérance, la pitié voire la cruauté n’est jamais aussi violente qu’envers une femme célibataire. On la prend forcément pour une nana à problème, une lesbienne (sacrilège !) ou une tarée.
J’ai re-maté tous les Bridget Jones l’autre fois – ne me jugez pas, j’adore la B.O et Colin Firth- et j’ai réalisé que toute ma vie, j’avais évolué entourée de références culturelles qui définissent les femmes célibataires de 30 ans comme des loseuses, des boulets un peu boulottes (on en revient toujours au poids) dans leur vie.
À la limite Bridget, je l’excuse, mais parlons de mon feed Instagram. J’ai eu le malheur de suivre une ou deux influenceuses enceintes ! Depuis, je suis constamment matraquée de photos de grossesse, de bébés ou d’allaitement. J’en viens à regretter le temps où Insta me suggérait des talons hauts et des extensions de cils. Algorithme ou simple hasard ? On dirait juste que le réseau social a été notifié que j’approchais la trentaine et qu’il fallait en remettre une couche supplémentaire.
Etre bien dans sa peau de célibataire, c’est être en accord avec soi-même
Le schéma classique veut qu’on passe son bac, qu’on fasse des études, qu’on ait des expériences sentimentales pendant notre jeunesse, pour arriver à la trentaine avec un CDI, un appart et un mec/meuf. Ainsi, on pourra dire aux apéros “Non mais j’ai quand même bien profité de ma jeunesse hein” clin d’œil appuyé, pour se rassurer d’aller dormir à côté de Jean-Mi et se conforter dans l’idée qu’on est dans les clous. Idem côté pro, dois-je raconter qu’il m’est arrivé à mes entretiens d’embauche qu’on continue à me poser la question d’une “éventuelle grossesse à prévoir”, sans même envisager le fait que 1) il est illégal de poser ces questions et 2) que je sois stérile, célibataire ou déjà mère ?
Mais quid de profiter de sa vieillesse ? Vieillesse qui visiblement débute dès 28 ans, car ma gynéco a employé le terme « grossesse gériatrique » en parlant de l’éventuel enfant que je n’aurais peut-être jamais. Pour mémo : une grossesse gériatrique est une grossesse chez une femme de plus de trente-cinq ans, et le terme gériatrie désigne la médecine des personnes âgées… sympa.
Aussi, je me suis récemment faite engueuler par une vendeuse chez Sephora quand je lui ai dit que “non, je n’ai pas commencé la crème anti-rides, encore moins depuis mes 25 ans. (Fouettez-moi, c’est maaaal). Suis-je la seule à avoir rêvé robe blanche et fiançailles très (trop) tôt, mais finalement me sentir plus que jamais adolescente aujourd’hui, n’ayant aucune envie de faire les compromis qu’imposent la vie de mère ou d’épouse ?
“Tu dis ça, mais quand tu rencontreras le bon, tu changeras d’avis”
Bon, faut que je vous le dise maintenant, à vous qui sortez ces punchlines bateau, certes sans méchanceté apparente et surement en totale bien-pensance : arrêtez avec ce genre de phrases où rien ne va ! Nous ne sommes pas des oiseaux, des Inséparables qui ne peuvent rien faire sans leur moitié. Déjà, ça ne veut rien dire “le bon”. Heureusement pour la love sphère, il existe plein de “le bon”, pleins de mauvais, et ça dépend juste à quel moment ils ont décidé de traverser notre vie.
Ensuite pourquoi le bon et pas la bonne ? Peut-être ai-je envie de continuer à explorer ma sexualité et celles des autres. Peut-être ne suis-je pas obligée d’être figée dans une sexualité hétéronormée ? Chose qui a l’air d’en titiller plus d’un, car à l’instant où l’on ne s’affiche pas pendant un certain temps avec un mec, et que l’on s’affirme féministe engagée, les gens se permettent de questionner mon orientation sans gêne, puisque j’ose parler de sujets de sexualité librement.
Qui sont les gens, la société et le tic-tac gynéco pour dicter nos vies ?
C’est si mal que cela d’envisager sa vie hors du spectre et des échéances qu’on nous impose ? De ne pas avoir envie de laisser les autres me dire que c’est trop tard, “au pire tu pourras penser à la congélation d’ovocytes, j’ai vu qu’en Espagne ils faisaient ça très bien”. Et si on avait juste envie d’être heureuses avec l’idée de se marier demain ou jamais, l’idée d’avoir des enfants avec un vieux, un jeune, une femme, d’en adopter 1, 2 ou 3 si on a la capacité de les élever décemment ?
Alors s’il-vous-plaît, cessez d’afficher cet air désolé quand quelqu’un vous expose son célibat. Généralement, nous ne le sommes pas du tout, nous, désolées. À part quand on est encore amoureuses d’un.e ex, ou qu’il fait froid, qu’on n’a pas fait les courses, qu’on vit un coup dur et qu’on a juste envie de câliner un corps à 37 degrés. Et pour toutes les courageuses qui traversent ces périodes en vivant tête haute, entourons-nous de nos ami-es, les frères et sœurs que l’on choisit, ils-elles font le travail même mieux que les autres, et font aussi 37 degrés.