Le mot gangbangs, à la consonance rude et explicite, est source de fantasmes, de craintes, de questionnements ou de dégoût, en fonction des sensibilités. Pour celles et ceux qui comprennent la signification de ce mot, c’est une pratique sexuelle qui laisse rarement indifférent, à la fois moquée et crainte, mais finalement méconnue. Excepté dans les films pornographiques, de « vraies » personnes pratiquent-elles le gangbang pour leur plaisir ? Et si oui, comment cela s’organise-t-il ? Pour en savoir plus, je me suis rapprochée de Bertrand, créateur du site Gang Bang à Paris, qui organise des événements libertins depuis 20 ans.

Passion Gangbangs

Cela semble improbable, mais oui, on peut se découvrir par hasard une passion gangbang. Dans le cas de Bertrand, cela a d’abord commencé par une anecdote narrée par son père au sujet d’un shooting avec des mannequins, mais surtout par l’émission Ciel Mon Mardi, qu’il regarde en juin 2001. Ce jour-là, il découvre Philgbo à la télé, qui explique comment organiser des soirées libertines. Il le contacte et c’est ainsi que démarre son aventure d’organisateur de soirées libertines. C’est durant cette même année qu’il lancera son site Gang Bang à Paris.

Définition gangbang : Le gangbang est une pratique sexuelle de groupe, où une personne au centre a des relations sexuelles avec plusieurs partenaires. Contrairement à la partouze où tout le monde se mélange ensemble, ici la personne au centre concentre toute l’attention du groupe.

Bertrand, organisateur de gangbangs à Paris
Bertrand, organisateur de gangbangs à Paris

Un gangbang, ça s’organise et ça suit des règles

Dans l’imaginaire de cette sexualité de groupe, on s’imagine facilement une situation bordélique, peu encadrée, et potentiellement dangereuse pour la personne au centre (généralement une femme entourée de plusieurs hommes). Bertrand est ferme, certaines règles doivent être suivies pour s’assurer de la bonne organisation d’un gangbang.

Parmi ses règles, il faut maximum cinq hommes présents, de toutes origines ethniques et types de physiologie, et qui se connaissent tous, pour préserver un côté intimiste. Il est important que cela ait lieu dans un endroit de qualité, propre, raffiné. Le gangbang doit être en compagnie de personnes d’une propreté irréprochable, dignes de confiance, qui savent aussi bien causer que se taire, et dans l’idéal cooptés. En somme, cela doit permettre à la femme ou au couple de vivre son fantasme d’une belle manière et en toute sécurité.

Par ailleurs, il faut faire très attention aux aspects sécuritaires et sanitaires : capotes obligatoires. Et par capotes obligatoires, il ne s’agit pas seulement d’avoir nécessairement des capotes sur soi, il s’agit aussi de bien être au fait de l’usage de celles-ci. Les hommes présents doivent savoir non seulement les enfiler, les retirer, mais aussi avoir conscience qu’il faut régulièrement les changer rapidement. À titre d’exemple, si on vient de pratiquer une sodomie, on ne pénètre SURTOUT PAS le vagin d’une femme ensuite sans avoir changé de préservatif ! Ceci peut provoquer des infections urinaires et vaginales sévères comme l’explique très bien Nouveaux Plaisirs dans son article Le plaisir anal, hygiène et bons conseils…

Et le lieu du gangbang ? Bertrand peut compter sur ses amis proches, qui lui fournissent des appartements luxueux au coeur de Paris ou dans d’autres villes de France, à titre gracieux. Une belle aubaine !

Hall de l’immeuble où Bertrand nous a reçu pour l’interview et qui accueille des soirées libertines

Quels profils de personnes pratiquent le gangbang ?

Pour ce qui est des hommes, Bertrand indique faire appel uniquement à son groupe d’amis. Pour lui c’est plus simple, car tout le monde se connaît et c’est l’assurance que chacun s’amuse. Il sait déjà que les hommes présents ont les qualités requises (oui l’endurance en fait partie) et qu’ils savent prendre du plaisir ensemble.

Il organise les soirées exclusivement sur demande des couples ou de femmes, jamais d’hommes seuls ou de groupe d’hommes. Pour respecter la vie privée des personnes, ce n’est jamais lui qui (re)contacte les personnes ayant souhaité participer à un gangbang. Même s’il arrive que des femmes seules ou en couple, fassent la demande de vivre ce fantasme, c’est souvent l’homme qui va le contacter. Cependant, prendre rendez-vous avec la femme en amont est une étape obligatoire. Il s’assure toujours qu’il s’agit d’une personne équilibrée, mais aussi de connaître le fantasme qu’elle veut vivre durant la soirée. Cela peut sembler contradictoire, mais Bertrand l’affirme « les femmes sont les reines de la soirée » ! Elles décident de l’ensemble, du type d’hommes qu’elles veulent avoir ce soir-là, du scénario… et leur demande est toujours respectée sans conditions.

Le gangbang, une pratique hétéronormée ?

Qu’en est-il des personnes transgenres, de la bisexualité ou encore de l’homosexualité ? Bertrand affirme avoir seulement organisé une fois une soirée avec un couple homme-femme bisexuels, autrement ses soirées sont très hétéro-normées. Ce qui arrive couramment en revanche est la présence de femmes bisexuelles. Un aspect dommageable, mais qui semble être monnaie courante dans le monde du libertinage, qui ne transgresse pas les règles sur ce point : la femme bisexuelle fait fantasmer, tandis que l’homme bisexuel reste une étrangeté peu tolérée. Bertrand accepte les hommes bisexuels dans ses soirées, cependant il reconnaît ne pas organiser de gangbangs bisexuels pour les hommes.

Un business de rencontres rentable ?

Cela peut sûrement être le cas, mais dans le cas de Bertrand, les soirées organisées par Gangbang Paris sont gratuites. D’ailleurs, il déplore l’aspect trop business d’autres organisateurs, estimant que faire payer les hommes, crée une urgence de rentabilité, du coup « il faut un retour sur investissement ». Un autre aspect qui le gêne est la volonté de démocratisation du libertinage. Pour lui, le libertinage doit rester un lieu d’élite comportementale, à ne surtout pas confondre avec une élite sociétale. Cela signifie un endroit où sont acceptées des personnes non grossières, qui savent se comporter et agir dans le respect. Il partage sa vision complète de ce sujet dans l’article La démocratisation du libertinage est vouée à l’échec.

Pour conclure, il nous a partagé un aspect essentiel qui le rend heureux d’organiser ces soirées et même d’y participer : « le libertinage m’a permis de réaliser des fantasmes que je n’aurais jamais fait » ! Finalement, ce qu’on retient c’est que le plaisir est au coeur de l’expérience, si chacune des parties prenantes respecte autrui, consent parfaitement et sait où elle met les pieds.