L’affaire Gisèle Pélicot nous a toutes bouleversé. Ce scandale a mis en lumière comme jamais les violences sexistes. Mais aussi la manière dont elles sont traitées par les institutions. Cette affaire tragique, à la fois personnelle et emblématique, a suscité une mobilisation féministe importante. C’est un miroir grossissant des mécanismes de domination patriarcale dans la société et au sein même de la justice. Ce scandale est un tournant crucial dans la lutte contre les violences sexuelles.

Qui est Gisèle Pélicot et quels sont les faits ?

Pendant près d’une décennie, Gisèle Pélicot a été victime de soumission chimique par son mari, Dominique Pélicot. Il a permis à des dizaines, peut-être même centaines d’hommes de la violer à son insu, de façon répétée. L’un d’eux venu plusieurs fois était même atteint du VIH et l’a violé sans protection. Heureusement, elle n’a pas été infectée. Ces agressions, minutieusement planifiées et enregistrées, ont impliqué plus de 80 hommes, recrutés en ligne par Dominique. Seuls 51 de ces hommes ont été identifiés et inculpés. Dominique Pélicot filmait les viols, conservant des preuves accablantes qui ont joué un rôle central dans l’enquête.

C’est par un concours de circonstances que les autorités ont découvert ces crimes. Un vigile d’un supermarché est intervenu, après avoir remarqué que Dominique Pélicot filmait sous les jupes des femmes. Il incite les femmes à porter plainte et grâce à une plainte, il sera interpellé. L’interpellation de Dominique a permis la saisie des enregistrements. Pour Gisèle Pélicot et ses enfants, cette révélation terrible marque le début d’un combat pour obtenir justice.

L’enquête montrera que les hommes retrouvés étaient tous dans un périmètre proche de la ville de Mazan, où habitait le couple.

Le procès Mazan et le refus du huis clos

En septembre 2024, le procès s’est ouvert à Avignon. Gisèle Pélicot a courageusement refusé le huis clos. Ainsi, elle souhaitait que son expérience serve à « changer le regard sur le viol » et que « la honte change de camp ». Ce choix a permis une large médiatisation de l’affaire et de briser le silence sur les violences sexuelles systémiques. Grâce à son courage et sa volonté, Gisèle Pélicot impose une prise de conscience collective sur la violence patriarcale. En affrontant son bourreau et ses complices lors de ce procès historique en 2024, elle devient une figure essentielle pour toutes les femmes.

Couverture de Libération sur Gisèle Pélicot

Pendant plusieurs semaines, la cour a entendu des témoignages glaçants et examiné les preuves accablantes. Le rôle actif de Dominique Pélicot, qui avait planifié et facilité ces agressions pendant des années, a été au centre des débats. Les 51 accusés identifiés ont comparu pour viols aggravés ou complicité. Saluons le travail de femmes journalistes qui ont permis de suivre le procès au jour le jour ! Anna Margueritat et ses live stories des audiences ont été des ressources précieuses.

Dominique, présenté comme le cerveau de ces crimes, était confronté aux preuves accablantes qu’il avait lui-même accumulées. Les accusés, quant à eux, ont tenté de minimiser leur responsabilité, sortant des excuses fallacieuses et abjectes :

« Je ne l’ai pas entendue ronfler parce que j’ai des acouphènes »
« Je ne savais pas qu’elle dormait, je croyais qu’elle était morte »
« Son mari m’a dit que j’avais le droit »
« Je croyais que c’était un jeu libertin »
« C’est mon corps qui l’a violée, pas mon cerveau »

Me Guillaume De Palma, un avocat de la défense a même osé affirmer « il y a viol et viol ».

« J’ai l’impression que la coupable c’est moi, et que les 50 victimes, c’est ceux qui sont derrière moi. Depuis que je suis arrivée dans cette salle d’audience je me sens humiliée. Je serai complice de Mr Pélicot ? Je serai alcoolique ? Il faut un degré de patience pour supporter ce que j’entends ici. Je ne vais pas répondre à cette question. Je comprends vraiment que les victimes de viol ne porte pas plainte, car on passe par un déballage qui est insultant.  » 

Gisèle Pelicot, sept, Le Monde

Le verdict du procès Pélicot

Le 19 décembre 2024, la cour criminelle du Vaucluse a rendu son verdict. Dominique Pélicot a été condamné à la peine maximale de 20 ans de réclusion criminelle pour viols aggravés. Les autres accusés ont écopé de peines allant de 5 à 15 ans de prison. Cependant, ces sanctions, bien que lourdes, sont jugées insuffisantes par de nombreux mouvements féministes, espérant des peines plus sévères face à l’ampleur des violences commises.

Un impact sociétal majeur

L’affaire Gisèle Pélicot est devenue un symbole féministe. Elle a brisé le silence et encouragé d’autres victimes à sortir de l’ombre, en rendant le procès public.

Il est important de mentionner aussi le cas de leur fille, Caroline Darian, qui est persuadée d’avoir aussi été abusée par son père à son insu. Des photos d’elle ont été retrouvées dans les dossiers de son père, dans des positions et tenues, dont elle n’a aucun souvenir. L’inceste et la pédocriminalité sont deux sujets en filigrane de ce scandale, qui restent relativement tus. Caroline Darian a fondé l’association « #MendorsPas : Stop à la soumission chimique », afin de militer pour une meilleure prise en charge des victimes et la formation des professionnel-les de santé.

Ce procès a aussi révélé les lacunes du système judiciaire français dans la prise en charge des victimes. Il y a nécessité de renforcer les lois sur le consentement. La lenteur des procédures, le manque de formation des juges sur les violences sexuelles et la culture persistante du viol sont évidents. Des avocat-es de la défense sont allé-es jusqu’à sous-entendre que Gisèle était peut-être consentante, et à questionner ses pratiques sexuelles.

Ce procès montre de façon criante qu’une réforme judiciaire est urgente sur la gestion des violences contre les femmes, avec une meilleure protection des victimes et des peines plus dissuasives pour les agresseurs.

Merci Gisèle Pélicot pour la force et l’espoir

L’affaire Gisèle Pélicot restera un moment charnière pour la reconnaissance des violences sexuelles en France et dans le monde. Gisèle impose un changement profond des mentalités. Plus qu’une affaire judiciaire, c’est un appel à l’action pour une société plus juste, plus égale, plus féministe. Gisèle est devenue notre visage d’une révolte collective contre l’oppression patriarcale. Merci de tout coeur Gisèle !