La montée de l’inactivité sexuelle affecte tout particulièrement la jeunesse : plus d’un quart des jeunes de 18 à 24 ans initiés sexuellement (28%) admettent ne pas avoir eu de rapport en un an, soit cinq fois plus qu’en 2006 (5%). Selon une enquête Ifop menée auprès d’environ 2000 personnes pour l’observatoire Lelo de la sexualité des Français-es, nous sommes en « récession sexuelle ». Comment l’expliquer et est-ce finalement bien grave docteur ?

illustration article récession sexuelle

Un désintérêt de plus en plus marqué pour le sexe

La place qu’occupe aujourd’hui le sexe dans la vie des femmes est beaucoup moins grande qu’il y a une trentaine d’années si l’on en juge par leur désintérêt croissant pour l’activité sexuelle : 62% des Françaises accordent aujourd’hui de l’importance à la sexualité dans leur vie, contre 82% en 1996.

Le taux d’activité sexuelle annuelle tombe à un niveau encore plus faible qu’en 1970 selon cette l’étude Ifop.

Parmi les raisons évoquées de la récession sexuelle, la concurrence accrue des écrans. Aussi bien les habitudes Netflix & Chill, que les activités sexuelles numériques. Lorsqu’on interroge les jeunes de moins de 35 ans vivant en couple sous le même toit, la moitié des hommes (50%, contre 42% des femmes) reconnaissent avoir déjà évité un rapport sexuel pour regarder une série/films à la télévision. On peut également mentionner qu’il y a une concurrence évidente aussi des supports pornographiques (sites pornos gratuits, OnlyFans…).

48% des hommes de moins de 35 ans vivant en couple préfèrent traîner sur les réseaux sociaux de partage de photos ou de vidéos, que de faire l’amour.

Vie conjugale ne rime plus obligatoirement avec sexualité

Excellente nouvelle : dans un contexte post #MeToo et d’une évolution du rapport au consentement, les Françaises acceptent beaucoup moins de se forcer à faire l’amour qu’il y a 40 ans ! La récession sexuelle est un mal pour un bien dans ce cas. Même si le chiffre d’aveu de rapports sexuels sans désir reste bien trop élevé, même aujourd’hui :

52% des femmes âgées de 18 à 49 ans déclarent qu’il leur arrive de faire l’amour sans en avoir envie, contre 76% en 1981.

La notion de devoir conjugal a du mal à être totalement déconstruite, alors que c’est la porte ouverte aux abus et violences sexuelles dans le couple. En 2019, la cour d’appel de Versailles avait condamné une femme qui refusait d’avoir des rapports sexuels avec son mari, à cause d’une « violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune ». 1https://www.rts.ch/info/monde/12058191-en-france-la-notion-de-devoir-conjugal-reste-un-critere-pour-les-juges.html

Pour autant, de plus en plus de gens désacralisent la sexualité et vivent une vie conjugale sans vie sexuelle. Une personne sur quatre actuellement en couple admet ne pas ou ne plus avoir d’intimité physique avec son conjoint. Désignée comme l’absence d’attirance sexuelle envers autrui, l’asexualité est une orientation sexuelle assumée aujourd’hui par 12% des Français et jusqu’à 23% chez les femmes âgées de 70 ans et plus. Nombre de femmes ne se sentent plus obligées de répondre au désir sexuel de leur partenaire, certaines se tournant même vers des attitudes plus radicales comme l’abstinence.

Le « réarmement démographique » attendra.

Lire ici l’étude complète Ifop pour Lelo. « Étude Ifop pour LELO réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 29 décembre 2023 au 2 janvier 2024 auprès d’un échantillon de 1 911 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus »