La question de la contraception masculine, voici encore un des tabous de notre époque en matière de santé sexuelle. On fait peser sur les femmes le sujet contraceptif, pourtant il n’y a pas de raison que les hommes ne soient pas des acteurs impliqués. La vasectomie, méthode de stérilisation définitive est un des choix à disposition de la gent masculine aujourd’hui. Des hommes ont accepté de se confier à nous sur leur décision d’avoir recours à cette contraception.

Pourquoi la vasectomie ?

Parmi les hommes interrogés, 43% ont fait une vasectomie, 57% y songent ou sont en processus de la réaliser. Parmi ceux ayant effectué une vasectomie, 46% ont effectué une vasectomie classique (la plus pratiquée en France), et 34% une vasectomie sans bistouri (cliquer ici pour connaître la différence).

Les raisons qu’ils énoncent sont principalement  : 

  • le désir de ne plus vouloir être père, sachant qu’ils sont déjà parents (35%)
  • le choix de ne jamais devenir père (18%) 
  • le souhait de ne pas faire peser la contraception uniquement sur leur partenaire (46%)
Julien, 36 ans

La majorité des témoignants se sentent satisfaits d’avoir fait ce choix contraceptif. Les mots “libéré” “soulagé” et “serein” reviennent régulièrement dans leurs propos. Parmi ceux qui en sont encore au stade de projet, une réelle impatience est exprimée. Leurs seules inquiétudes sont essentiellement dues au manque d’informations disponibles.

La vasectomie en débat dans les couples  

Les hommes interrogés sont majoritairement en couple, mais parmi ces derniers, seule la moitié a pris cette décision conjointement avec la partenaire. Dans 28% des cas, les femmes ont réagi positivement et soutenu leur compagnon, mais 18% des hommes font mention d’une désapprobation de leur compagne. Dans certains cas, la vasectomie a même mené à une séparation.

Rémi, 43 ans

Auprès de l’entourage familial, la vasectomie ne passe pas toujours sans accroc non plus. C’est sujet à pressions sociales, comme le non désir d’enfant d’une femme. Ludovic, 26 ans, explique qu“annoncer [la vasectomie] à un repas de famille revient à déclencher la 3ème guerre mondiale. Entre les « tu vas changer d’avis », « tu feras quoi quand tu rencontreras quelqu’un qui en veut ?», « faire un enfant c’est ce qu’il y a de plus beau au monde”… C’est une horreur ! Pour peu qu’on sorte un peu du moule, on est forcément dans l’erreur”. 

Avant de choisir la vasectomie, les moyens de contraception utilisés par ces couples étaient essentiellement la pilule contraceptive (45%), le préservatif masculin (44%), le stérilet (36%) et le retrait avant éjaculation (22%). La grande majorité d’entre eux indique que ces moyens contraceptifs représentaient une gêne ou une inquiétude. Pour Bertrand, 49 ans, il y avait “trop de risques d’oublis [de pilule] pour madame et pas assez d’investissement dans la contraception de ma part”. Il se sent désormais heureux d’avoir “rectifié le tir”.

On rappelle que la vasectomie a un taux d’efficacité de 99,9%, et permet à la femme de ne plus prendre aucune contraception. 

Il est intéressant de voir que 32% des hommes interrogés font part d’une réelle inquiétude, quant aux effets secondaires possibles de la contraception féminine. Han, 41 ans, rapporte que “l’implant a flingué la libido et le moral” de sa femme, Michael, 40 ans, trouve qu’il y a “trop d’effets secondaires sur la santé avec la pilule”

Un processus médical jugé trop long en France

À la question “trouvez-vous que le processus médical pour y arriver est contraignant ?”, 40 % ont répondu non. Parmi eux, 20% ont précisé l’avoir effectué dans un autre pays (Suisse, Canada). “Ici au Canada c’est très courant , pas de bistouri, ça dure 5 minutes”, nous confie Yann, 42 ans. Un rapport de l’ONU indiquait que 23% des canadiens avaient eu recours à la vasectomie contre seulement 0,8% des Français. 

Cependant, 38% des hommes interrogés jugent le processus trop long en France. Pour Michel, 54 ans, “Les 4 mois de délai de réflexion forcée sont une absurdité imposée à des personnes majeures et responsables.” Plusieurs soulignent l’insistance abusive de médecins, qui semblent vouloir les dissuader de leur choix.

Julien, 36 ans
Sébastien, 50 ans

Pour certains médecins, le conseil peut même devenir exigence, comme dans le cas de Ludovic, 26 ans : “Après plusieurs semaines de recherches, j’ai trouvé une urologue qui accepte de m’opérer, à la condition que je fasse congeler mon sperme. Ce n’est absolument pas obligatoire, mais comme c’est elle qui manie le bistouri, elle se permet de poser des conditions. Ce qui entraîne des coûts supplémentaires”

L’intervention est bénigne, mais le processus autour peut durer longtemps, surtout que la stérilisation n’est pas immédiate. En plus des 4 mois de réflexion, il est nécessaire après l’opération de faire des examens d’éjaculat (appelés spermogramme), pour vérifier qu’il n’y a plus aucun spermatozoïde. L’Association Française d’Urologie estime qu’un spermogramme est nécessaire 3 mois après la vasectomie. Entre temps, il faut garder un autre moyen de contraception. 

Une méthode contraceptive qui doit sortir de l’ombre

À la question “Comment avez-vous eu connaissance de l’existence de la vasectomie ?”, majorité d’entre eux ont eu les infos sur Internet (37%) et auprès de l’entourage (33%). Seuls 8% ont découvert la vasectomie grâce à leur médecin traitant !  D’autres sources d’information ont été citées comme la radio, le gynécologue de la femme, une sage-femme, ou encore les séries Seinfeld et Californication

Le tabou subsiste autour de la vasectomie et selon eux, les raisons principales sont les freins culturels (74%), le manque d’informations (72%) et le patriarcat (53%). 

Par ailleurs, un amalgame est encore bien présent entre stérilisation et castration, qui signifierait donc “perte de virilité”. La sexualité masculine et ses clichés virils ont la vie dure ! Pourtant, comme le rappelle ce témoignage :

Florimond, 28 ans

Une meilleure information sur les questions de santé sexuelle est essentielle pour briser les tabous. Ainsi, il est temps que la contraception masculine soit également un sujet de société important. Le corps médical a aussi un rôle essentiel à jouer dans l’évolution des moeurs et doit se mobiliser pour l’amélioration de ce travail éducatif.